De la jeunesse de Manstein à son entrée en guerre
Milieu familial, éducation et généalogie
Dès son jeune âge, Erich Von Manstein est prédestiné à mener une vie de soldat, ne serait-ce qu’en raison de ses origines familiales et de son éducation.
Dixième enfant du général Eduard Von Lewinski, cinquième enfant de la seconde épouse de celui-ci Helene Von Sperling, Erich naît à Berlin le 14 novembre 1887.
La jeune sœur de sa mère Helene n’ayant pas d’enfants et suivant une pratique courante à l’époque, le couple Lewinski place chez Hedwig von Sperling, marié au lieutenant général Georg von Manstein, le jeune Erich dès son baptême (Mais l’adoption avait été décider avant même sa naissance)
Georg von Manstein, père adoptif de Erich
Ainsi, dès cette cérémonie religieuse, Fritz Erich Georg von Lewinski prend le nom de famille de von Manstein.
Ses parents biologiques et ses parents adoptifs étaient issus de familles aristocratiques Prussiennes ayant des traditions militaires qui remontaient à un temps très éloigné, et qui avaient servit les Rois de Prusse depuis de nombreuses générations
En fait pour être plus précis, il fallait remonter nombres de générations pour retrouver le commencement aux traditions militaires des familles Lewinski et Manstein, jusqu’aux Chevaliers Teutoniques et au XIIIe siècle.
Du coté des Lewinski comme des Manstein, seize de ses ancêtres étaient des officiers ayant servis le Kaiser ou le Tsar
A elle seul, au XXe siècle, la famille Lewinski a fournie sept généraux à l’Armée Allemande
Arbre généalogique de la famille Manstein
Le Général Eduard Von Lewinski, le père naturel de Erich, était un officier d’artillerie qui gravit les grades militaires jusqu’au commandement de corps d’armée.
Son père adoptif, Georg Von Manstein, Lieutenant Général, ancien officier d’infanterie, devint Commandant de division.
Les Sperling provenaient également d’une famille militaire distinguée. Le grand père maternel de Erich, nommé Oskar Von Sperling, était un général, de même que le frère de ses mères (adoptive et maternelle). La plus jeune sœur de ses mères était l’épouse de Paul Von Hindenburg, Feld-maréchal, et président du Reich de la République de Weimar.
L'oncle et la tante de Manstein, Paul Von Hindenburg, sa femme Gertrud Von Sperling et leur fils (décédé en 1881) Photo datant de 1882
Georg Von Manstein, père adoptif de Erich, pourtant membre de la Noblesse Prussienne n’était pas un propriétaire de terres. Mais depuis la guerre de 1870 (contre l’Empire Français de Napoléon III), au cours de laquelle le père et le beau père de Georg s’étaient illustrés (Respectivement Commandant de Corps d’Armée et Chef d’Etat Major d’Armée), les familles Manstein et Lewinski avaient reçu une dotation pour service rendue. Votée par le Reichstag, cette dotation avait garantie aux deux familles une indépendance financière, en complément des salaires déjà versés par l’armée
Erich Von Manstein est donc très tôt prédestiné à une carrière militaire et cela par une immersion dès son plus jeune âge dans la vie et les coutumes militaires, de part son père adoptif mais aussi de la part des traditions familiales
Son éducation entière repose sur la tradition du corps des Officiers Prussiens. Il sera donc éduqué, que ce soit à la maison comme à l’école des cadets, selon les traditions et l’éthique propre à la vieille caste militaire Prussienne, a quoi il faut ajouter un fort Protestantisme Luthérien.
De Plön à la Grande Guerre
Erich Von Manstein est un enfant de constitution délicate. Après 5 ans d’études au lycée de Strasbourg (lieu d’affectation de son père), Erich rentra en 1900 (il avait 13 ans) dans le corps royal Prussien de cadets, d’abord à Plön puis à Berlin. Il y demeura 6 ans, période pendant laquelle sa constitution se renforça à un point tel que lors de son entrée dans l’armée, en 1906, il fut déclaré apte provisoirement pour le service actif.
Durant les quatre années de son séjour à Berlin, Erich fut affecté en tant que membre de la Noblesse au corps des pages de la cour du Kaiser Guillaume II
Fondé en 1717 par Frédéric-Guillaume Ier, Roi de Prusse, le corps Royal Prussien de cadets exerce une influence grandissante sur la vieille armée Allemande. En effet, ce corps regroupe les académies militaires de Berlin pour garçons de onze à dix-huit ans. A l’origine réservé à la Noblesse, cela est toujours d’actualité au XXème siècle. (Fils d’Officiers, de Fonctionnaires, d’Hobereaux de l’Est, qui sont des Nobles peu fortunés)
Ce corps avait pour tache de procurer l’éducation nécessaire aux jeunes Nobles désirant devenir Officier.
Mais contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’entraînement militaire n’était qu’une « matière » parmi d’autres, tels le sens de l’honneur, du devoir ou l’enseignement des matières académiques. L’accent est particulièrement mis sur le développement du caractère afin de créer un mélange harmonieux des meilleurs aspects ayant trait à l’éducation physique, académique, militaire et religieux. Cette formation insistait naturellement sur la loyauté des cadets envers l’Empereur.
Erich et ses camarades furent donc éduqués dans un environnement de pure loyauté et de chevalerie envers l’Allemagne
Le sens de l’honneur et du devoir, l’obéissance absolue et l’esprit de camaraderie étaient les principales valeurs qui lui furent inculquées et qui forgèrent son caractère
Manstein était intelligent et capable de maîtriser un sujet très rapidement. Cependant, ses bulletins scolaires indiquaient qu’il pouvait obtenir de meilleurs résultats s’il s’appliquait davantage et mettait mieux à profit son talent.
En 1906, après avoir réussi ses examens pour entrer à l’Ecole Supérieure de cadets à Lichterfelde, il était nommé porte-étendard du prestigieux 3ème Régiment de Garde à pied Prussien.
L’Ecole Supérieure de cadets basé à Lichterfelde
Agé de 19 ans, Manstein commençait alors sa véritable carrière militaire. Toutefois, pour lui, être soldat était beaucoup plus qu’un métier. En fait, ce n’était rien de moins qu’une raison d’être et de vivre intimement liée à sa vision du monde.
En 1907, Manstein était promu au grade de second lieutenant et devenait ainsi un officier de l’armée Impériale Allemande.
1913 arriva et Manstein entra à l’Ecole de Guerre (Kriegsakademie) de Berlin afin d’y suivre une formation d’officier d’Etat Major qu’il ne put compléter en raison du déclenchement de la Grande Guerre en 1914.
l’Académie Militaire Prussienne de Berlin (Kriegsakademie)
Manstein ne disposera jamais d’une formation d’officier d’Etat Major en bonne et due forme, et ce jusqu’à sa mort.
La Grande Guerre : Premiers Exploits
Au début de la guerre, Manstein fut nommé Lieutenant et servit au sein du 2ème Régiment de réserve de la Garde, en Belgique, puis en Prusse Orientale et finalement en Pologne.
Dans cette unité, il combattus sur le front de l’Ouest, à la bataille de la Marne et à la capture de Namur, et à l’Est, à la bataille des Lacs de Mazurie, qui fut (avec la bataille de Tannenberg) le frein de l’avancé Russe en Prusse Orientale et qui apporta la gloire à son oncle Hindenburg, le Feld-maréchal commandant la 8ème armée
Mais en Novembre 1914, après plusieurs mois de guerre, Manstein fut grièvement blessé en Pologne, dans un combat au corps a corps par 2 balles de fusils. L’une se logea dans son épaule, la seconde dans le nerf sciatique
Après un temps de repos et de rééducation, Manstein reprit du service à la fin du printemps 1915. Il est affecté au groupe d’armées du général Max Von Gallwitz, à titre d’officier d’état major, il prit alors part aux offensives allemandes en Pologne septentrionales et en Serbie.
Promu au grade de Capitaine à l’été 1915, il occupa ensuite les fonctions d’adjudant au quartier général de la 12ème armée. En 1916, il servit comme officier d’état major, d’abord au sein de la 11ème armée, lors de la bataille de Verdun, puis dans la 1ère armée du général Fritz Von Below, le commandant en chef, et du major-général Fritz Von LoBberg, le chef d’état major, durant la bataille de la Somme.
L’année suivante, il devient officier d’état major, chargé des opérations, au sein de la 4ème division de cavalerie, en Estonie et en Courlande, qui à ce moment la, luttait contre les bolcheviques.
A partir du printemps 1918, Manstein exerça les mêmes fonctions au sein de la 213ème division d’infanterie, déployée sur le front de l’Ouest. Il participa ainsi aux grandes offensives allemandes de Mai et de Juillet, ainsi qu’aux batailles décisives de Reims et de Sedan.
Il servit sur ce théâtre d’opérations jusqu’au 11 Novembre 1918 et la signature de l’armistice.
La signature de l'armistice du 11 Novembre 1918 à Rethondes
Au cours de la guerre, le capitain Manstein se vit décerner deux grandes distinctions militaires :
Croix de Fer Première Classe
L'Ordre de la Maison des Hohenzollern
N'ayant commandé aucune troupe durant le conflit, Manstein fit ses preuves au sein des états-majors. Il eu l'opportuinité de démontrer, dans le cadre de ses diverses affectations d'officier, un talent exceptionnel pour la tactique ainsi qu'une compréhension remarquable des exigences et des besoins du commandement au moment d'une offensive
Déja, lorsqu'il n'était qu'adjudant (d'un bataillon de fusillers), il avait prouvé son talent militaire. "Il a été le meilleur adjudant que j'ai jamais eu" déclara plus tard son commandant